[carnet de bord] 8, 9, 10 & 11 août


8 août

Réveil 6 h 30. Dessins en attendant le bus 11 h 20 pour Egilsstadir.
Café dans l'autre café. La patronne emmerde les employés sans rien faire elle-même. Dessin et rencontre avec Stella.

Bande son : Uprising de MUSE
Le voyageur qui a choisi Stodvarfajördur — au fond d'un des imposants fjords de l'est—, au hasard pour dernier havre avant le retour au bercail rencontrera Steffi, tchèque et géographe. Elle a rejoint pour l'été ses amis islandais, dont Suzanne — qui a investi une partie de la criée sur le petit port "fall down few years ago". Avec d'autres graphistes, ils essaient de faire vivre un village délaissé par les jeunes, happé par l'activité mainstream de Reykjavik. The old church est désormais un hôtel — cher — mais certainement propice à des ébats amoureux mêlants glace et feu.

Le chauffeur du bus Sterna refuse de me prendre parce que je n'ai pas le pass bus. Ubuesques palabres mais il ne cède pas. Je m'en tape et vais faire du stop.
1 heure d'attente mais un marin pêcheur tatoué me prend, qui semble avoir tout son temps et m'emmène à bon port.

Ablutions au syndicat d'initiative. Achat de Blankets-cadeaux.

Site des graphistes, dont Hugrun Ivarsdottir, qui retravaille les motifs ancestraux sur ces couvertures.

Re-stop vers Sedysfjordur.
Camping bourré de personnes de toutes sortes qui vont prendre le ferry demain matin.
Manger de pizza 1 dans un resto très chouette. ballade + dessin. Manger de pizza 2 dans le même resto. Claqué dodo tôt.


9 août

Lever 6 h.
Dessin à jeun puis café à l'ouverture d'un hôtel à 7 h 00. Fin de dessin avec le ferry accosté.


Bande son : Grapevine de CREEDANCE CLEARWATER REVIVAL
Henrick est islandais de Reykjavik. Il prend facilement les auto-stoppeurs. Le voyageur et lui ont le même niveau d'anglais ; ils conversent ainsi aisément. Henrik est un ouvrier du bâtiment qui n'a pas peur de travailler quinze heures par jour. Actuellement il nettoie et répare la tôle dont sont faits les parements extérieurs de la plupart des bâtisses. Il adore que les proprios lui demandent de repeindre en jaune d'or solaire, en bleu outremer profond ou même en blanc éclatant. Son attention irait plutôt actuellement vers sa fille qui est musicienne. Tout cela, dans un temps éphémère, construit une belle connivence avec le voyageur — qui se projette tout à coup malgré lui de retour à la maison.

Embarquement ferry cool à l'heure. Soleil sur le pont, cabines... la routine de l'aller.

Bande son : Sensuality de Björk
L'heure du départ vient d'être corné par le Norröna, répétée en écho tout au long des contreforts de Seydisfjördur. Toute cette micro-société d'estivants au saga-land — qui contemple la ville sous un soleil idéal —, sera cueillie à chaud au sortir du fjord, bientôt brassée et rebrassée par une mer aux lames croisées et coupantes, transpercée par la densité de l'air arctique et par le froid constat des terres qui s'éloignent et s'estompent.
Tout malin qu'il est, le marcheur n'échappe pas à cette faillite du corps et reste, ahuri, sur le pont supérieur au sky-bar le bien nommé, accompagner du regard la chorégraphie des goélands, décryptant dans l'écume du sillage les vingt-deux jours de la marche en Islande.

Nauséeux presque toute la journée, comme l'ensemble des passagers. La mer est dure. Incapable de manger le midi. Douche à 19 h. dodo dans une couchette sans voir ni connaître les autres occupants de la cabine.

3 h du matin arrivée aux Iles Féroé.


10 août

Debout 9 h 00. Café, mer calme, en forme, long passage au sky bar. Ecriture de textes, dessins, repas midi extra, sieste, 17 h sky bar puis coucher de soleil de carte postale sur la houle développée par le sillage du bateau.




11 août

Lever 7 h 00 seul sur le pont supérieur pendant un bon bout de temps.
12 h arrivée au port d'Hirtshals.

Début d'une très longue journée pour traverser l'Europe.

Bande son : A forest de THE CURE
Le voyageur croit le voyage terminé qu'il se poursuit encore. Les prévisions d'un retour par bus du nord du Danemark à l'ouest de la France sont balayées par la réalité des vicissitudes du voyage. La réparation imprévue d'un pont ferroviaire, l'arrêt inopiné et nocturne d'un train dans un no mans land allemand, un feu de forêt aux alentours d'Aix-la-Chapelle et c'est toute l'assurance du voyageur paradoxalement renforcée.
Une correspondance fortuite permet au dessinateur d'affronter la cathédrale de Cologne, mégalithe historié et charbonné, triste signal des supercheries humaines.


-------------------------------------  FIN  -------------------------------------